Marcel Fournier, peintre, navigateur au long cours

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capture dsc 0312 gifC’est en 1996 qu’une exposition rétrospective organisée à Chantelle et consacrée aux peintres régionaux, dévoile au grand public la vie et l’œuvre de Marcel Fournier. C’est donc à l’issue de près d’un siècle d’oubli que ce peintre, né à Chantelle en 1869 mais installé et domicilié à Voussac, au village de La Juche, apparaît au grand jour !

Parler d’oubli est bien le terme approprié car cette longue absence, injuste si l’on en juge par la qualité de ses toiles, est néanmoins le fruit de son mode de vie avec ses lointains voyages, sa discrétion, celle ensuite de ses héritiers.

Certes, il a exposé sa production au Salon des Indépendants à partir de 1902, vendant ça et là quelques œuvres, peut être une centaine. Certes, il est bien référencé au Bénézit comme « paysagiste à l’affût d’atmosphères creusoises »,…

Il est donc bien d’ores et déjà reconnu !

Néanmoins, l’essentiel de son œuvre reste confidentiel et à sa mort, en 1917, il laisse à la Juche un atelier de plusieurs centaines de références qui devient ensuite la propriété d’héritiers qui feront tout pour éviter la dispersion.

L’œuvre de Marcel Fournier reste donc un trésor caché, mais trésor, nourri de ses voyages autour du monde… Car Voussac, effectivement, a produit un navigateur au long cours, explorant le Moyen Orient, l’Extrême Orient, le Nouveau Monde…!

A partir de 1885, le Salon des Artistes Français perd son statut académique et officiel avec son style de peinture établi, normé, pour laisser la place à des salons d’avant-garde qui verront s’épanouir des écoles nouvelles, les impressionnistes, fauvistes… C’est là que notre peintre tout à la fois expose et cherche son inspiration. Visiblement, il a su observer et tirer profit de l’oeuvre de ses contemporains !

En complément de cette quête de l’inspiration, Marcel Fournier suit, vraisemblablement vers ses 16 ou 17 ans une formation académique avec le professeur de dessin Milanolo à Moulins.

Il suivra ensuite à Paris les cours de l’Académie Julian.

Dès 1887, cédant à l’appel de l’aventure au loin, il s’engage dans la marine marchande dans laquelle il franchira tous les échelons, depuis mouse à 18 ans jusqu’au grade de capitaine. Cet engagement lui fera découvrir Suez, Rio de Janneiro, le golfe persique, l’Océan indien, la Mer de Chine,…

Désormais, ses escales lui fourniront une part importante de son inspiration.

Très ouvert d’esprit, Marcel Fournier s’est également intéressé à la photographie. Il n’empêche qu’il peindra toujours d’après nature.

Notre peintre va donc dans une première partie de sa vie s’apparenter à Corot, Millet, Monet… première époque qui sera nourrie de paysages de l’Aumance, vers Hérisson, de Crozant dans la vallée de la Creuse, de marchés à Chantelle, de lieurs de gerbes à Lafeline…

Puis, au rythme des voyages, le temps aidant, des couleurs exotiques apparaîtront, rappellent Cézanne, Gauguin… dont il loue le talent.

Viendront alors des paysages de Cassis, Marseille, de l’Estaque avec une tendance fauviste… et plus tard encore, des vues de Bushir (Iran), de l’Île de la Réunion, Singapour avec une vraie tendance orientaliste…

Bon an, mal an, Marcel Fournier a vécu de son art conjugué à son activité de navigateur, mettant toujours un point d’honneur à ne pas dépendre de sa famille pourtant aisée.

Au quotidien, Marcel Fournier est non conformiste, plus ou moins en rupture avec la tradition familiale, joyeux et trubulent, avec un sens inépuisable de l’amitié.

Marcel Fournier voulait parcourir l’univers, à la recherche d’une inspiration toujours nouvelle… Mais la vie en décidera autrement.

En 1915, la France mobilise ses réserves et Marcel Fournier, à 46 ans, est mobilisé dans la Somme, au front ! Sa conduite, son courage, lui valent la Croix de Guerre avec citation !

Durant cette période, il se livre à un étonnant « reportage » sur les théâtres d’opération, dessinant au crayon de rapides esquisses qu’il complète ensuite à l’encre de chine ou à l’aquarelle.

Ces dessins émouvants sont la dernière expression de sa créativité. Le 2 mars 1917, toujours au front, Marcel Fournier, une fois encore, se dit oppressé… C’est ainsi que la mort le saisit, à 48 ans, sans ajouter aux souffrances du lieu et de l’époque, celles de la maladie.

L’œuvre de Marcel Fournier reste intimement liée à son mode de vie itinérant, libre, ouvert. Son œuvre est le carnet de voyage d’un pèlerin attentif aux couleurs et aux lumières, peignant le monde comme il le découvre.

Sources : catalogue d’exposition, Association des musées bourbonnais : Antoine Paillet. Nombreuses autres contributions, Eléonore Chalmin, Pierre Royet…).

(Malheureusement, les illustrations, scannées à partir d’éditions papier déjà anciennes, ne peuvent rendre compte à leur juste valeur de la beauté des œuvres).